L’apnée obstructive du sommeil (AOS) peut être un vrai cauchemar. Cette affection médicale troublant la respiration prive les conducteurs d’un paisible sommeil. Pire encore, les personnes atteintes pourraient même s’endormir au volant.
On ne devrait donc peut-être pas s’étonner que la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA), l’agence nationale américaine responsable de la sécurité routière, ait été mandatée pour explorer quels seraient les coûts et les avantages associés à l’imposition de programmes de dépistage, de tests et de traitements obligatoires de l’apnée du sommeil. Mark Rosekind, un expert reconnu dans le domaine des troubles du sommeil, a également été nommé à la tête de cette agence.
De nombreuses études ont révélé clairement que l’apnée est un véritable enjeu dans l’industrie du camionnage. Récemment, l’institut national américain responsable de la santé et de la sécurité au travail, le National Institute of Occupational Safety and Health (NIOSH), a réalisé une étude auprès de 1 670 conducteurs de camion sur long parcours. Cette étude révèle que 15 % des participants montrent des signes d’apnée du sommeil et que 59 % d’entre eux ont une forme ou une autre de troubles respiratoires. Une étude antérieure réalisée par l’agence fédérale américaine responsable de la sécurité des entreprises de camionnage, la Federal Motor Carrier Safety Administration, suggère que près du tiers des camionneurs souffrent d’apnée du sommeil.
Vous vous demandez toujours pourquoi un exploitant de parc de véhicules devrait s’inquiéter? L’Université de Stanford a réalisé une étude auprès de conducteurs. Ses tests ont révélé que le temps de réaction des conducteurs souffrant de fatigue causée par un sommeil interrompu est aussi lent que celui de conducteurs qui ont bu de l’alcool. Selon trois mesures différentes, les résultats des patients atteints d’apnée étaient aussi mauvais ou pires que ceux des participants qui étaient ivres selon la loi. Entre temps, la société Schneider National a réussi à réduire de 30 % le nombre de collisions évitables après avoir identifié et aidé 339 camionneurs atteints d’AOS.
De toute évidence, les camionneurs font partie du groupe démographique des conducteurs qui présentent les risques les plus élevés. Les hommes sont plus susceptibles d’être atteints de ce trouble, et 97 % des camionneurs au Canada sont des hommes. De plus, l’apnée est plus courante chez les personnes obèses. La NIOSH a relevé que 70 % des camionneurs étudiés étaient obèses, comparativement à 31 % des autres travailleurs. Qui plus est, 17 % des conducteurs obèses sont atteints d’obésité morbide.
Les risques augmentent chez les personnes de plus de 40 ans, dont le cou mesure plus de 17 pouces (43,2 cm) de circonférence, dont les voies respiratoires supérieures sont étroites et celles présentant une importante surocclusion. Les signes d’une atteinte possible vont des ronflements bruyants à la somnolence excessive malgré un temps de repos suffisant, en passant par les maux de tête et les problèmes de concentration. Si elle n’est pas traitée, cette situation peut entraîner des problèmes cardiaques. À tout le moins, elle peut nuire à la productivité ou provoquer de la fatigue qui augmente les risques de blessures au travail.
Dans la plupart des cas, l’apnée se manifeste sous forme d’AOS, qui survient lorsque les tissus mous, détendus, bloquent les voies respiratoires supérieures. Il existe également d’autres cas qui sont liés au centre respiratoire situé dans le cerveau. Peu importe la cause, les conducteurs atteints cesseront de respirer pendant 10 à 120 secondes, se réveilleront en haletant et retomberont dans un sommeil agité.
La bonne nouvelle est que l’apnée peut être rapidement diagnostiquée et traitée.
Le questionnaire de Berlin est un test populaire qui aide les répondants à savoir s’ils sont à risque de faire de l’apnée du sommeil. Outre leur poids et leur âge, ce questionnaire demande aux répondants s’ils ronflent, si leurs ronflements sont bruyants (plus forts que quelqu’un qui parle?), à quelle fréquence les ronflements surviennent et s’ils dérangent d’autres personnes. Le questionnaire demande également si quelqu’un a remarqué que le répondant arrête de respirer dans son sommeil, à quelle fréquence il se sent fatigué et s’il s’est déjà endormi au volant. Le résultat permet de savoir si l’avis d’un médecin serait souhaitable.
Les programmes de dépistage peuvent nécessiter que les camionneurs passent une nuit dans un laboratoire pendant qu’ils sont branchés à un polysomnogramme ou qu’ils réalisent un test du sommeil à domicile pour faire le suivi des courbes de respiration. Même s’il existe peu de cliniques offrant ce service, il sera plus facile d’y obtenir un rendez-vous avant la mise en œuvre d’un programme réglementé.
Parmi les traitements les plus répandus, on note l’utilisation d’appareils de ventilation en pression positive reliés à un masque dans lequel de l’air passe pour empêcher les voies respiratoires de se fermer. Les appareils portatifs peuvent être utilisés dans les cabines munies d’un convertisseur continu-alternatif suffisamment puissant.
Toutefois, les options ne se limitent pas à cet équipement. Il existe d’autres solutions comme porter des bas de contention, perdre du poids et éviter de consommer de l’alcool et des narcotiques.
Bien entendu, un programme efficace de gestion de la fatigue va bien au-delà de ces efforts de dépistage préventif. Les exploitants de parcs de véhicules peuvent aider les conducteurs à rester alertes grâce à des programmes de formation et des initiatives de répartition. Les conducteurs qui sont informés d’un changement à leur horaire 24 heures à l’avance ont toujours de meilleures chances d’obtenir le sommeil dont ils ont besoin. Il est également moins probable que les conducteurs qui connaissent les heures de départ et les échéances de livraisons prennent le volant pour un voyage de nuit après une longue journée d’activités en famille.
Lorsque toutes ces mesures sont réunies, tout le monde dort un peu mieux.